MAGMA MAGAZINE MAGMA Magazine N°100 | Page 9

INTERVIEW Magma Magazine N°100 • novembre/décembre 2015 « on ne peut pas catégoriser notre musique et on ne veut pas non plus la définir par un style précis car nous n’avons pas de limites dans notre création. » Pourquoi ce nom « Vegan Dallas » ? Vous êtes tous végétariens ? Non, pas du tout ! En fait, j’ai beaucoup entendu parler d’un chouette désert, à côté de Dallas, dans l’état du Texas aux USA… une vraie terre de cowboy ! Et « vegan », c’est un peu le contraire d’un cowboy. Au fond, cela définit bien notre musique qui oppose des choses tout en les rapprochant, une musique de contraires... Parle-nous un peu du groupe et de sa création… Vegan Dallas est un projet que l’on a commencé à fantasmer il y a deux ans, voire même depuis plus longtemps. Nous sommes tous les cinq, Julien Chamla, Richard Comte, Simon Henocq, Adrian Bourget et moi, issus du collectif Coax de Paris. On a des groupes en commun mais nous avions la volonté de jouer vraiment ensemble et de faire une musique différente. Je connaissais aussi Julie Lardrot qui s’occupe de la scénographie du concert. Elle s’est intégrée au projet quelques mois après car nous avions constaté que dans la musique on se préoccupait rarement de la lumière. Pour accompagner la notre, elle a donc fabriqué une importante installation avec deux rétroprojecteurs et des écrans puis créé des images et des lumières. Ce qui est intéressant, c’est qu’elle ne refait jamais la même chose, son travail est très organique : des projections de liquides, d’objets, de matières en mouvement… L’image permet alors d’entrer dans la musique. Le concert s’articule autour d’une station musicale, une grosse installation sur laquelle vous jouez. De quoi s’agit-il ? Ce ne sont pas des instruments classiques ? Pas exactement… Avant d’imaginer des sons et des morceaux, nous avons créé nos instruments. Je joue sur un set de percussions métalliques électroniques qui est une extension de mon vibraphone. Il est composé d’objets divers, de gongs asiatiques, de bols tibétains, de culs de poules (saladiers de pâtissier), d’abat-jours et d’équerres. J’ai électrifié mon vibraphone et j’ai mis un capteur sur mon abat-jour. J’ai beaucoup développé mon instrument avec Sylvain Rifflet avec qui j’ai collaboré sur plusieurs albums, notamment Alphabet en 2012. Le résultat sonne comme un mélange entre un son occidental et un son indonésien. Julien, lui, a conçu sa harpe basse électrique à treize cordes en collaboration avec un luthier. Simon fabrique lui-même ses sonorités en amont. Richard utilise une guitare qui offre des possibilités sonores larges : guitare acoustique classique, traitement du son par effets analogiques, système d’amplification et bien plus encore. Avant de jouer quelque chose, on a travaillé au moins un an et demi sur le projet car écrire et composer pour des instruments que l’on a construits et améliorés, c’est difficile ! Il a fallu trouver un mode d’écriture qui nous corresponde. Qu’est-ce qu’il en ressort? Déjà, on ne peut pas catégoriser notre musique et on ne veut pas non plus la définir par un style précis car nous n’avons pas de limites dans notre création. Depuis le début, on se dit « sans étiquette ». On ne travaille pas dans une esthétique particulière. On écoute beaucoup de musiques orales, traditionnelles, des sonorités qui nous parlent puis on s’empare de sons et on en tire des influences. Le résultat est au carrefour de beaucoup de choses. Ça se rapproche des musiques improvisées avec un gros travail sur les rythmes. Il y a des sons que l’on retrouve dans notre quotidien et d’autres qui peuvent venir de très loin notamment avec les gongs asiatiques que j’utilise. On retrouve aussi quelque chose de l’ordre de la transe. C’est un mélange de musique urbaine, rurale, électronique, acoustique… Derrière tous ces contraires qui s’assemblent, se cache-t-il une volonté de rapprocher des territoires et des cultures ? Un message, peut-être ? Je ne crois pas que l’on aille aussi loin. Ce que l’on veut c’est réussir à transmettre notre musique au public. Les oreilles sont globalement formatées. J’ai déjà fait des concerts pédagogiques et j’ai constaté qu’à l’école primaire, par exemple, ils écoutent assez attentivement. Dès que l’on passe à des collégiens, c’est plus compliqué, ils commencent déjà à se fermer. Les musiques sans paroles les touchent moins. Avec Vegan Dallas, on ne veut pas faire quelque chose qui soit déjà connu. On travaille beaucoup autour du rythme car on sait qu’il peut fédérer. Il y a aussi des voix mais pas de paroles à proprement parler. On ne veut pas faire de compromis sur notre musique et il n’y a donc pas de message particulier, on souhaite surtout faire écouter des choses différentes aux gens. La dernière fois que Magma t’a interviewé, c’était en 2007, tu bossais sur Radiation L]ZHHۛ