Magazine n°9 KRAEMER_MAGAZINE_09_pages-simples | Page 18

18 KRAEMER—30 ANS HISTOIRE clientes par jour. Un volume déjà consi- dérable pour l’époque ! Certaines de ces clientes venaient sans rendez-vous, sans coiffeur attitré. « Je me positionnais et je finissais par fidéliser une clientèle. J’en suis arrivé à cette conclusion impor- tante : une cliente qui entre dans un salon pour la première fois signifie qu’elle s’est montrée insatisfaite par rapport à des expériences vécues dans d’autres salons précédemment. Par l’attention qu’on lui porte, il faut qu’on montre à la cliente qu’elle est unique. Si on a compris cela, elle se montrera fidèle à son coiffeur et à son salon à l’avenir. » Le plus beau métier du monde Un jour, Yannick découvre qu’on lui attribue une colonne avec son nom dans le planning de la semaine. «  Quelle fierté ! », ne peut-il s’empêcher d’insister avec le même plaisir des années plus tard. Par la suite, il se fixe l’objectif de remplir cette colonne, du matin au soir, du mardi au samedi, et de janvier à décembre. Il y parvient, et se crée une clientèle attitrée. Et puis, il y a la bienveillance que lui ma- nifeste Tony  ; ce dernier prend le jeune homme prometteur sous son aile, en 1985 : «  Tony m’emmène souvent à Paris. Dès lors, je rencontre des gens passionnés. » Par son intermédiaire, Yannick fait la connaissance de deux personnes qui vont énormément compter pour lui  : Jacques Dessange et Bruno Pittini, le Directeur Artistique du groupe. Avec émotion, il se souvient de ce directeur artistique hors du commun, qui le marque fortement. « C’est un monsieur qui dégageait une aura exceptionnelle par son professionnalisme et sa créativité. Par sa capacité à transmettre des savoir-faire, il est devenu le maître à penser de nombreux adeptes qu’il a entraînés dans son sillage.  » C’est ce dernier qui finit par le convaincre qu’il exerce « le plus beau métier du monde ». Il lui trace une voie et l’incite à aller au bout de ses rêves. Ce qui confirme sa propre vo- lonté de changement, notamment dans la manière de permettre aux collaborateurs d’évoluer en pleine créativité. En effet, en pionnier, Bruno assurait un management “  Par l’attention qu’on lui porte, il faut qu’on montre à la cliente qu’elle est unique ! ”  YANNICK KRAEMER  souple qui permettait à chacun de s’expri- mer. Il favorisait la liberté et surtout de belles avancées esthétiques au début des années 80, avec l’avènement de coupes déstructurées avec une finition floue réali- sée à la main. «  Cette période, insiste Yannick, m’a donné envie d’avancer ; elle m’a conforté dans mon ambition.  » Cette ambition, il l’appuie désormais sur l’équilibre que lui inspire le tandem Jacques Dessange-Bru- no Pittini. Un vrai modèle pour lui dans la mesure où il associe un business-man avec la tête sur les épaules et le sensible qui faisait preuve de tant d’imagination. « Ils conjuguaient à eux deux la question du désir et la nécessaire réalité. Ils ont fait du groupe ce qu’il est aujourd’hui et permis à des centaines de coiffeurs d’évoluer et à des gens comme moi de participer à ce vaste mouvement. » Encouragé par Bruno Pittini, véritable maître à penser et initiateur de bien des parcours, Yannick décide de lancer lui- même sa propre affaire. À sa grande sur- prise, non seulement Tony lui offre une écoute attentive, mais l’accompagne dans la nouvelle aventure : celle du salon de la rue des Serruriers, derrière la place Gutenberg, à Strasbourg. C’était il y a trente de cela, le 7 décembre 1987. Dès l’ouverture du salon, pas moins de 15 salariés s’y activent avec enthousiasme, avec parmi eux la fine fleur de la coiffure à Strasbourg, dont un certain Eric Pfalzgraf, futur créateur de la marque Coiff1rst qui reste aujourd’hui encore l’un des amis les plus proches de Yannick. Comment ex- plique-t-il ce succès si soudain ? Il nous répond par le maître-mot qui l’anime  : « La passion ! Non pas l’argent, insiste- t-il, mais la passion  !  » Cette passion se manifeste dans la relation qu’il entretient à ses clientes, une relation quasi amou- reuse selon lui, qui l’engage à les combler de plaisir. Ce plaisir est une promesse qu’il lui faut tenir, les rendre belles bien sûr, mais aussi partager des moments de délectation. Pour lui, la coiffure contient « sa part de rêve ! » New York-Berlin La fin des années 80 constitue pour Yan- nick Kraemer une période déterminante qui se construit sur des choix. « Des choix, précise-t-il, qui s’imposent à moi. » Il a le choix entre développer une marque ou se consacrer intégralement à l’artistique ; il opte pour le développement. «  Dans le métier de coiffeur, nous explique-t-il, il est possible de ne se consacrer qu’à l’ar- tistique, créer des collections, participer à des shows de coiffure ou à des défilés de mode. Cela correspond à l’activité d’un Directeur Artistique au sein d’un groupe. » Il sous-entend ainsi qu’il s’agis- sait une voie qui s’ouvrait à lui – il avait bien sûr les compétences pour entamer une belle carrière de DA  –, mais l’envie d’entamer un développement avec la création de nombreux salons de coif- fure est plus forte. Il manifeste ainsi un véritable tempérament d’entrepreneur. «  Ma créativité s’exprimait ainsi, par l’ouverture de salons et l’élaboration d’un concept commun à ces salons. » Après avoir repris le salon de son père à Hatten, Yannick entame sa conquête du Bas-Rhin en ouvrant des salons à Hague- nau, Schiltigheim, Saverne et Obernai.