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du sud (3 700), Yémen (2 700), données très vraisemblablement inférieures à la
réalité. On estime qu’au moins 20 384 civils ont été tués du fait d’attaques menées
au moyen d’engins explosifs à large rayon d’impact, notamment au Yémen et en
Syrie.
La guerre urbaine entraîne aussi une vulnérabilité croissante des biens
et des infrastructures de caractère civil, comme les écoles, les hôpitaux ou
encore les services d’adduction d’eau. Dans le cas du Yémen, le conflit en cours
a entraîné un véritable effondrement du système sanitaire. La destruction et la
fragilisation des infrastructures civiles ont non seulement des effets de long terme,
et surtout sont à l’origine de pertes civiles indirectes parfois plus lourdes que les
victimes directes d’attaques.
La problématique de l’usage des armes explosives à large impact en zones peuplées
Dans le contexte des guerres urbaines, l’usage de certaines armes, conçues pour être
utilisées sur des champs de bataille ouverts, entraîne des effets indiscriminés et
disproportionnés.
Un réseau international d’ONG, le réseau « INEW » s’est ainsi constitué en 2015 face à
ce qui apparaît comme une zone grise du DIH : même si les civils ne sont pas
nécessairement les cibles directes de l’usage de ces armes, ils en sont souvent les
premières victimes. Les effets disproportionnés et indiscriminés de ces armes sont liés
pour l’essentiel à leur « large rayon d’impact » qui se définit par trois critères selon le
CICR : 1) la puissance de destruction (bombe aérienne), 2) la dispersion de multiples
munitions (lance-roquettes multiples), 3) l’imprécision inhérente à l’arme (système de
lancement indirect, comme un mortier).
Pour Handicap International, dont vos rapporteurs ont auditionné les représentants,
l’usage des armes explosives à large impact en zones peuplées est la plus grave menace
contemporaine pesant sur le DIH, d’où le lancement d’une campagne en vue de
l’adoption d’une déclaration politique sur ce sujet . La France s’est déclarée début
octobre à Vienne en faveur de l’ouverture de négociations en ce sens (voir infra ).
Enfin, les conflits armés sont aujourd’hui majoritairement des conflits
armés non internationaux, selon la définition juridique du CICR (voir supra ). Le
nombre de conflits armés non internationaux a plus que doublé entre 2001 et 2016,
passant de moins de trente à plus de soixante-dix. Si la prédominance des conflits
non internationaux peut susciter des questions dans la mesure où le DIH est moins
développé au plan normatif pour ce type de conflits que pour les conflits
internationaux (voir infra ), il faut aussi tenir compte de l’introduction d’éléments
« d’externalité », qui, comme l’a souligné en audition M. Olivier de Frouville,
professeur de droit public à l’Université Panthéon-Assas (Paris II) et directeur du
Centre de recherche sur les droits de l’homme et le droit humanitaire, peuvent
remettre en cause la dichotomie classique entre conflits armés internationaux et non
internationaux. Ainsi, les conflits contemporains sont nombreux à avoir un caractère
transnational : c’est le cas de la zone sahélienne ou de certaines poches de
conflictualité en Afghanistan et au Pakistan, qui font fi des frontières nationales
alors que le DIH a une référence territoriale dans son champ d’application.