Luxury Indian Ocean LUXURY MAURITIUS No 5 EDITION 2018 | Page 66
INVESTIR
G
érard Sanspeur, vous êtes
économiste, on se souvient de vos
passages au Freeport, au Board
of Investment… aujourd’hui,
vous semblez vous intéresser en premier
lieu à l’urbanisme. Qu’est-ce qui explique ce
changement de priorité ?
Il n’y a aucun changement de priorité,
seulement un changement de secteur d’activité.
Vous rappelez que je suis économiste, soit un
opérateur prioritairement soucieux d’usages
optimaux des ressources à sa disposition. Or,
quand j’arrive à la présidence de l’ex-State Land
Development Company, en mesure d’influer
sur l’aménagement de 920 hectares de prime
lands, qu’est-ce que je constate ? Que la plupart
des projets des promoteurs fonciers sont
dysfonctionnels, aussi bien économiquement
que socialement…
Photo: Nasurudin Keramuth
©La Sentinelle Ltd
GÉRARD SANSPEUR : « L’INTÉRACTION
DANS UN ESPACE URBAIN FAVORISE LE
DYNAMISME SOCIAL ET ÉCONOMIQUE »
"INTERACTION WITHIN AN URBAN ENVIRONMENT
PROMOTES SOCIAL AND ECONOMIC DYNAMISM"
Conseiller économique du ministre des Finances et président du
Board of Investment, Gérard Sanspeur est choisi, à la mi-2016, pour
présider la future société Landscope*. Exploitant des terres à co nvertir,
des immeubles et des parcs d’affaires, cela l’encourage à repenser
l’aménagement de l’espace.
Economic adviser to the Minister of Finance, and President of the Board of
Investment, Gérard Sanspeur is chosen in mid-2016 to preside over the future
company, Landscope*. Developing land for conversion, buildings and business
parks encourages him to renew his vision for space planning.
PROPOS RECUEILLIS PAR GILBERT AHNEE
Que voulez-vous dire exactement ?
Le business model des opérations foncières
repose sur un étalement de la surface
résidentielle, avec de larges superficies sous
gazon, ce qui impose des besoins en eau
proches, ou au-delà du seuil de gaspillage. De
surcroît, cet habitat est disposé de telle sorte
qu’il n’y a pas, entre voisins, le type d’interaction
qui, dans un espace urbain, favorise un
dynamisme social et économique. Les résidents
de ces morcellements sont éloignés des lieux de
travail, de scolarité et d’approvisionnement, ce
qui génère un trafic automobile également au-
delà des niveaux raisonnables. Vivre dans des
morcellements de ce type coûte cher aussi bien
à leurs résidents qu’à ceux qui sont victimes de
ce type d’habitat, victimes de la pollution et
des embouteillages, des pénuries d’eau et de la
privatisation de l’espace.
Et si vous deviez faire autrement, comment
feriez-vous ?
Ce ne sont pas mes idées personnelles, ou
celles de X ou Y, qu’il s’agit de promouvoir.
En revanche, il s’est constitué, au fil des années,
sous diverses latitudes, un réel corpus de
pensée, inspiré par des expériences concrètes
de vie collective, au sujet de l’organisation de
l’espace et de l’urbanisme. C’est en 1961 que
paraît The Death and Life of Great American
Cities, de la journaliste et militante Jane
Jacobs, ouvrage dénonçant le urban sprawl,
l’étalement encouragé aux USA par l’accès
facilité à l’automobile. Cette ligne de pensée
sera poursuivie en Europe, notamment dans la
mouvance de la Prince’s Foundation for Building
Community, initiée par le Prince Charles, de
même qu’aux États-Unis, par l’école du New
Urbanism…
En quelques mots, comment résumeriez-
vous ce courant de pensée…
Je vais le faire en un seul mot : mixité.
Contrairement à l’aménagement en zones
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