Luxury Indian Ocean LUXURY INDIAN OCEAN #11 EDITION 2021 | Page 43

LUXURY INDIAN OCEAN BUSINESS
Il est l ’ ambassadeur de l ’ héritage partagé par Maurice , La Réunion , les Seychelles , Madagascar et les Comores – les cinq îles qui la constituent . Il est le tremplin fédérateur de notre identité commune . Affirmer leurs singularités face à la concurrence globale est une stratégie touristique employée par chacun de ces territoires . Mais , l ’ Indianocéanie , en tant qu ’ ensemble , en tant qu ’« espace original d ’ une richesse naturelle remarquable , à la croisée des influences africaines , indiennes , européennes , chinoises ou encore arabes » – comme le définit le secrétaire général de la COI , Vêlayoudom Marimoutou – est un produit d ’ autant plus cohérent et compétitif .
En 2020 , le défi commun d ’ une crise sanitaire s ’ impose à nos îles , toutes grandement dépendantes du tourisme . Pour Yvan Combeau , historien , politologue et directeur du Centre de Recherches sur les Sociétés de l ’ océan Indien , il « met à l ’ épreuve les réalités en matière de coopération indianocéanique et la manière dont l ’ action de la COI intègre le quotidien des habitants ». À la COI , un plan de relance est à l ’ étude pour soutenir les filières régionales , améliorer la connectivité et promouvoir l ’ économie circulaire , avec le concours du secteur privé , notamment à travers Cap Business océan Indien – l ’ association des chambres de commerce de nos îles . « Nous proposons la réactivation des comités régionaux des aviations civiles et des transporteurs aériens . Faut-il un ciel ouvert ? Quelle viabilité des compagnies nationales ? Faut-il aller vers des partenariats stratégiques , des fusions ? Ce sont des questions importantes dont il faut débattre , partage M . Marimoutou . L ’ Alliance Vanille des transporteurs aériens , qui avait été lancée en 2016 , prévoyait la mise en place d ’ un pass pour stimuler le tourisme régional . C ’ est une idée à reprendre ! Et c ’ est aussi aux offices du tourisme des pays et à l ’ Association des îles Vanille de mieux placer le produit régional . »
Il existe toutefois un « écart entre les acteurs politiques et les populations locales dans cette appropriation de l ’ indianocéanie . Ces distances disent beaucoup sur les disparités , sociales ou économiques , entre ces territoires », souligne M . Combeau . À ces questions s ’ ajoute celle du risque de muséification et de folklorisation de nos traditions . Dans Patrimoines partagés — Traits communs en Indianocéanie de Jean-Michel Jauze ( 2016 ), l ’ exemple est donné des Villages Créoles et du Parc National de La Réunion où un cahier des charges strict est imposé aux habitants pour toute construction et activités afin de préserver leur authenticité . On pense également aux spectacles de séga dans nos hôtels , habillés d ’ artifices . « La folklorisation commence lorsqu ’ on se fige dans une prétendue authenticité . Elle est poussée par la demande d ’ exotisme du visiteur à qui on vend un folklore qui , parfois , n ’ a même plus court », commente le secrétaire général de la COI . Pour encourager un tourisme responsable , deux voies : l ’ éducation et une politique culturelle renforcée . « Il faut à la fois valoriser les patrimoines et les évolutions de ces expressions culturelles », ajoute-t-il .
En 2013 , lors du colloque « L ’ indianocéanie socle et tremplin de notre devenir », organisé à l ’ initiative de Jean Claude de l ’ Estrac , alors à la tête de la COI , le concept de l ’ Indianocéanie prend un nouvel élan . Universitaires , politiques et acteurs économiques et culturels de la région dégagent ensemble une vision d ’ avenir . « Les dynamiques initiées par la COI — qui fêtera ses 40 ans en 2022 — ont été déterminantes pour faire vivre , au-delà du terme , des réalités à travers des coopérations et de nombreux projets : environnement , pêches , économie , sécurité alimentaire , paix et stabilité … Pour dépasser les limites de la reconnaissance d ’ un espace indianocéanique , ces réussites doivent être plus amplement confortées pour se traduire et s ’ ancrer dans la vie des habitants », partage M . Combeau .
« Les populations vivent l ’ Indianocéanie sans le savoir . Partout , le brède est dans nos cuisines . Partout , la mixité culturelle nous raccroche au monde . Partout , la francophonie est une réalité dans un océan largement anglophone . Partout , on retrouve des architectures cousines , explique M . Marimoutou . Bien sûr , il y a aussi des spécificités . Madagascar et son extraordinaire biodiversité . Les Comores , cette interface entre l ’ Indianocéanie et la civilisation des rivages , l ’ aire swahilie . Les Mascareignes et les Seychelles qui racontent des histoires de rencontres d ’ hommes et de femmes venus d ’ ailleurs . Dans toutes ces îles , il y a un patrimoine naturel et humain qui en font des destinations singulières . Mais d ’ une île à l ’ autre , les traits communs sont indéniables . »
Jean-Michel Jauze le souligne dans son ouvrage , la plupart des espaces insulaires voient dans le tourisme un levier de développement qui impacte positivement d ’ autres secteurs de l ’ économie , l ’ emploi et le niveau de vie . Du point de vue social et politique , il est en tout cas indéniable que la promotion de cet espace des îles du sud-ouest de l ’ océan Indien , à la fois singulier et multiculturel , participe à l ’ émergence d ’ une unité régionale .
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