évasion
fly away
ّ
لنتحـلق
voyage dans le temps I journey through time I
évasion
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لنتحـلق
رحلـة عبـر الزمـن
Palerme
nom de Movida circule actuellement comme un vent
de renouveau. Vent espagnol qui montre combien la
cité portuaire demeure ouverte sur le monde.
Les créateurs qui luttent
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Courtisée par les Grecs, les Romains, les Phéniciens, les Normands, puis par
les Espagnols et plus tard les Anglais, encadrée de montagnes qui mettent
une fin brutale à ses rues rectilignes, léchée par la Méditerranée, elle est
d’une grande beauté, mais d’une beauté bien souvent délabrée.
O
1
La Gazelle 58 I
98
n vous dira que c’est à
cause de la guerre et de
ses
bombardements.
Mais soixante ans après,
alors qu’à peine plus de
3 % de sa population vit
encore dans son centre
historique, il y a lieu de s’étonner. La vraie raison est
ailleurs. Elle a pour nom Cosa Nostra. Loin de n’être
qu’un mythe de cinéma, Le Parrain III de Coppola,
tourné dans ses rues, est une réalité. Celle qui empêche la ville d’entrer pleinement dans le XXIe siècle.
Certes, Palerme est fière de ses traditions, de son
tumulte, de ses ruelles bruyantes, gourmandes, foisonnantes de marchés, de palais et d’églises, de
places baroques comme le Quattro Canti, son cœur
névralgique. Mais elle est moins campée dans le
passé qu’on ne pourrait le croire. Tout simplement,
elle lutte pour sa survie. On prétend que les fonds
européens, destinés à la culture ou à de grands projets d’infrastructures, disparaissent parfois comme
par désenchantement. Même le Teatro Massimo,
l’opéra de Palerme, souffre d’un manque de moyens.
« Il ne dispose même pas de salle de répétition », regrette Gioacchino Lanza Tomasi, ancien directeur de
l’opéra de Rome et du Teatro San Carlo de Naples.
« Cela l’empêche d’avoir plusieurs programmations
en même temps, comme c’est le cas de la plupart
des grands opéras. » Cousin et fils spirituel de Giuseppe Tomasi di Lampedusa, célèbre auteur du
Guépard, adapté par Luchino Visconti en 1963, Giacchino et son épouse Nicoletta sont retournés vivre à
Palerme. Malgré tout. Car c’est une ville qu’on a dans
le sang. Anne-Clémence de Grolée en sait quelque
chose. Après les Beaux-Arts de Nantes, elle est arrivée en résidence d’artiste dans les an- nées 1990
et n’est jamais repartie, tombée sous le charme de
cette ville riche et complexe, lui inspirant une œuvre à
forte dimension anthropologique. « Dans l’un de mes
projets, j’ai interrogé des vieux d’une ville voisine, pensant subir la fameuse omerta, mais ils ont tous été
heureux de pouvoir enfin se livrer. » Les langues se
délient. Plus encore : toute une génération de jeunes
Palermitains se mobilise désormais pour redonner
une belle énergie à cette ville. Au point que le doux
Cela a commencé en 2004, avec AddioPizzo, une
association de commerçants liguée contre le racket
mafieux. Aujourd’hui, ils sont près de 850 à se serrer
les coudes. Parmi eux, beaucoup de jeunes créateurs, sortis des écoles d’art de Rome, de Milan ou
de capitales européennes, qui retournent à Palerme
avec l’envie de faire bouger les choses. Depuis 2012,
ils ont colonisé la charmante rue Paternostro, au
cœur du quartier de la Kalsa, et y installent des boutiques-ateliers de vêtements, accessoires ou objets
de décoration, souvent à base de matériaux recyclés. Native des Pouilles, Carmela Dacchille trouve
son inspiration sur les marchés. Elle arpente les
quartiers populaires de la Vucciria, Capo ou Ballarò
en quête de papiers d’emballage colorés et décorés.
Elle en fait des carnets aux messages poétiques
qu’elle vend dans une librairie de la rue Paternostro.
Et comme de nombreux jeunes artistes, Carmela
fait partie d’un des nouveaux réseaux de coworking créatif. À la fois lieux de travail et d’événements
artistiques, ils ont pour nom Multivolti, neu [nòi] ou
Clac. Abréviation de Centro laboratorio arti contemporanee, ce dernier a vu le jour en 2012 autour de
Cristina Alga qui, après des études de communication à Bologne, a éprouvé le besoin de travailler en
communauté. Avec des amis architectes, photographes et vidéastes, elle a loué un gigantesque appartement et mené à bien un premier et audacieux
projet : celui de l’Ecomuseo Urbano Mare Memoria
Viva. Dans une ancienne gare, ils ont créé ensemble
des installations multimédias ayant pour but de
donner aux Palermitains l’envie de se réapproprier
leur front de mer, devenu crasseux et inaccessible.
Mais le véritable pionnier de cette Movida n’est
autre que Francesco Pantaleone. Issu d’une famille
de négociants en objets religieux depuis 1905, il a
vite compris qu’il voulait devenir galeriste. « Vendre
un objet religieux ou une œuvre d’art, c’est d’abord
vendre une chose en laquelle on croit », déclare-t-il.
En 1999, il part pour New York et fait ses armes chez
Gagosian, avant de lancer sa propre galerie. « Mon
but était d’apprendre à promouvoir la nouvelle vision
et le nouveau langage de l’art sicilien, ne plus rester
dans les clichés de la Sicile rurale et larmoyante. »
Aujourd’hui, dans son très bel espace en béton ciré
se succèdent des artistes de renommée internationale : Alessandro Di Pietro, Julieta Aranda, Loredana
Longo, Ignazio Mortellaro, des Siciliens, aux œuvres
1,3. Vue de l’hôtel Villa Igea
depuis l’un des nombreux ports
de plaisance de la ville. I
View of the hotel Villa Igea
from one of the numerous
marinas in town. I
مشهد لفندق فيال إيجيا واحد
من إحدى أحواض مراكب النزهة
I .الذي تحويــه املديـنة
2. On aime ce vrai 5-étoiles qui
a connu son heure de gloire
à l’époque du « cercle des
étrangers », dans des salons
dignes de Proust, conçu par
l’architecte Ernesto Basile. I
We like this real 5-star that
became famous during the
period of the « foreigners
circle », in salons worthy of
Proust, designed by architect
Ernesto Basile. I
استحق هذا الفندق الذي
عاش فرتة املجد يف عهد «دائرة
األجانب» ي