La Gazelle | Page 111

focus I focus I qui englobe beaucoup de libertés comme la liberté de conscience, la liberté sexuelle,... etc. Les libertés ne devraient pas être classées comme prioritaires les unes par rapport aux autres, mais quand on a la liberté d’expression, on peut se battre pour toutes les causes. Très rapidement, j’ai compris qu’aucune liberté ne peut être défendue, tant que l’on n’a pas une connaissance réelle des discussions de l’assemblée constitutionnelle. Il y a de nombreuses organisations qui travaillent sur des thèmes qui peuvent être discutés dans la constitution, donc au lieu de travailler uniquement sur la liberté d’expression, j’ai œuvré pour ouvrir toutes les discussions aux ONG et aux citoyens qui peuvent donner leur avis. À partir de là ce n’est pas la liberté d’expression qui est garantie mais tout le reste. La première chose à faire pour « Al Bawsala » était de garantir l’accès à l’information à l’intérieur de cette constitution et l’accès à tous à l’assemblée et aux députés. FFL : Y a t-il de nouveaux projets de l’ONG avec ce nouveau gouvernement ? AY : Pas avec le gouvernement, mais oui il y a de nouveaux projets. Pour le moment, on suit 89 municipalités de Tunisie et avant la fin de l’année nous voulons surveiller les 268. La bonne nouvelle est que nous allons installer des tablettes avec des connexions internet dans toutes les municipalités de la Tunisie pour que les citoyens reportent ce qui se passe dans leurs communes. FFL : Quelle est La réforme qui t’a fait le plus plaisir ? AY : C’est la parité dans la constitution, j’ai dormi deux nuits à l’assemblée pour que cette réforme passe. La femme tunisienne ne pourra pas être vraiment l’égale de l’homme tant que les femmes rurales seront mises à l’écart et ne représenteront pas la femme tunisienne comme on la décrit dans les médias. Pour moi, mettre la parité dans la constitution, c’était avant tout avoir la parité dans les conseils régionaux, dans les mairies et voir de nombreuses femmes devenir leaders politiques dans leurs régions. FFL : As - tu d’autres projets en dehors de l’ONG ? AY : Oui, j’en ai beaucoup, mais il y a surtout un projet que j’ai soutenu et j’espère pouvoir m’y consacrer cette année : c’est le « CinéVog» du Kram, qui est une restauration d’un des premiers cinémas tunisiens avec un toit ouvrant. C’est un cinéma qui a beaucoup marqué les quartiers populaires qui sont maintenant devenus des quartiers d’extrémismes religieux. Je me souviens qu’on disait quand il y avait des westerns spaghetti, que le méchant aurait déjà ‫تركيــــز‬ rencontres encounters ‫لقـــــاءات‬ été tué si c’était au « CinéVog». La deuxième chose, en tant que fan inconditionnelle de jazz, est de pouvoir me consacrer au club de jazz de Tunis. Je pense que, si à la place de chaque projet de mosquée on mettait un cinéma où un lieu dédié à la culture, on changerait le visage du pays. FFL : Si on faisait un film sur ta vie, quelle actrice jouerait ton personnage ? AY : Une très jolie. Je choisis Isabelle Huppert qui a joué dans « le pianiste ». Voyage FFL : Tu vis entre Paris et Tunis, quelle ville préfères tu ? AY : Aucune des deux, je ne vis pas dans les villes que je préfère. Je n’appartiens pas à une ville, j’appartiens à pleins d’endroits dans le monde où je sens que je suis chez moi. Chez moi c’est des lieux, souvent des hôtels, mais si je devais choisir un endroit, je ne dirais pas Tunis, je dirais le centre de Tunis. FFL : Quelle est ta destination préférée en Tunisie ? AY : Le centre ville de Tunis, c’est là où j’ai vécu toute ma vie, j’ai fais mes études au collègue Sadiki. C’est très beau, quand on connaît les immeubles italiens de Bab Bhar, la rue d’Allemagne, la rue de Madrid. Maintenant les immeubles sont complètement en ruines mais quand on connaît comme moi l’hôtel à 5 dinars la nuit de mon grand père avec sa magnifique façade italienne. C’est ici que je me sens chez moi, le marché central et puis la médina. Pas la médina des touristes, mais toutes ces petites ruelles de souk el Blat et de la Kherba, où les touristes ne passent pas. Je trouve les lieux magnifiques et bizarrement je trouve que ce sont les endroits les plus protégés. FFL : Dans ce numéro on part visiter Venise, tu connais cette ville ? J’irais à Venise quand je serais enceinte car c’est la ville de l’amour et pour moi avoir un enfant c’est la concrétisation de l’amour. FFL : Si tu pouvais inviter n’importe qui le temps d’un dîner dans le monde entier, qui choisirais-tu et dans quel restaurant ? AY : J’inviterais Big Bill Broonzy qui est un très vieux jazzman et on irait à l’« Uncle bar » à New Haven manger un burger avec une bonne bière. FFL : Et pour un tour du Monde ? 3 destinations et avec qui ? AY : La première destination, ça serait l’Islande, puis le Japon et pour finir l’Australie. Honnêtement je n’emmènerais personne, parce que ce sont des destinations tellement exotiques que je me refuse d’être accompagnée pour être obligée de me confronter à ces autres cultures. 113 I 60 ‫الغـزالــــة‬