JE SUIS UN CAPTEUR D ’ IMAGES , AVEC FORCE , J ’ ABSORBE ET JE RESTITUE À MA FAÇON .
JE SUIS UN CAPTEUR D ’ IMAGES , AVEC FORCE , J ’ ABSORBE ET JE RESTITUE À MA FAÇON .
La question d ’ une forme de provocation se joue à la lecture de ses peintures , même si on le sent plus dans la subversion que dans la provocation , avec une approche facétieuse , un sourire , y compris quand le résultat semble sérieux , voire grave en soi . Ne venez cependant jamais mentionner Basquiat qui pratiquait lui aussi l ’ insertion textuelle . Alors que nous le citions au détour d ’ une question à propos du foisonnement des motifs , Robert s ’ agace fortement ! « Je suis arrivé dans le monde de l ’ art en 1980 et pour parler de moi , on va toujours parler de Basquiat ou de Keith Haring . Je n ’ ai rien contre eux , j ’ apprécie leur art , mais mon travail n ’ a pas besoin qu ’ on s ’ en réfère à eux ; je ne dépends pas d ’ eux . Est-ce que lorsque l ’ on parle de Basquiat ou de Keith Haring on s ’ en réfère à Combas ? Non ! C ’ est ce qui est injuste et énervant . » Le message est bien reçu ! Il se souvient : « En 1980 , au musée de St Etienne [ le Musée d ’ art et d ’ industrie , ndlr ], à l ’ exposition Après le classicisme qui montrait ces mouvements de renouveau de la peinture dans le monde , j ’ y étais ! Et il n ’ y avait ni Basquiat ni Keith Haring … » Nous pouvons le rassurer , personne ne l ’ associe ni à l ’ un ni à l ’ autre . Ce sont de simples contemporains qui ont imposé une vision de l ’ art , déterminante certes , mais
37 ni plus ni moins passionnante que la sienne . À ce titre , il semble rompre avec ses premières amours américaines . « Hollywood ou la culture rock américaine des années 60-70 qui ont pu m ’ influencer , je m ’ en suis éloigné aujourd ’ hui . Nous , les artistes français , il ne faut pas s ’ illusionner , face aux Américains on reste des Poulidor . » On sent une petite pointe de regret par rapport à une reconnaissance internationale qui aurait tardé à venir , même si l ’ on sait que la notoriété de Robert n ’ est pas à faire , ni ici ni ailleurs . Il nuance cependant : « Maintenant , j ’ ai pris du recul face à tout cela . Mes ambitions ont été revues à la baisse . La reconnaissance internationale , si je ne l ’ ai pas , je n ’ en veux plus à la terre entière . Je sais me satisfaire de mon succès et de la chance que j ’ ai de pouvoir vivre de mon travail et de pouvoir continuer à peindre . »
Il manifeste d ’ autres regrets : « Je me sens dépassé par certaines formes d ’ art que l ’ on appelle “ art contemporain ” dominées par de grandes puissances économiques . Cet art est devenu le hobby nec plus ultra des ultra-riches de la planète . On ne navigue pas dans le même monde . Moi je reste un peintre à l ’ ancienne , j ’ achète de la toile , des couleurs , des pinceaux . Je n ’ ai pas d ’ assistant . Je reste “ humain trop humain ”. » Et de taper sur un marché de l ’ art dont les règles peuvent être désormais faussées : « Certains artistes considérés comme l ’ élite sont partout . Ils font les grandes foires style Fiac ou Biennale d ’ Art comme à Venise . Moi et mon marchand Laurent Strouk qui défend l ’ art français sommes déconsidérés par ce petit milieu , mais on s ’ en sort plutôt bien sans eux . » La raison ? Une fidélité demeurée intacte de certains collectionneurs : « Oui , je leur dois mon succès , ils achètent mes peintures depuis 40 ans et me permettent de durer . » Et de nous la jouer un brin Caliméro , face à une réalité qu ’ on ne nie pas . « J ’ ai fait bien sûr des expositions dans de grands musées comme celle au mac Lyon en 2012 , grâce à Thierry Raspail ; mais en général je suis persona non grata auprès des institutions , du Ministère de la culture et de ses Haut fonctionnaires . Je n ’ ai pas rencontré de Ministre de la culture depuis 2005 . Pourtant sur le marché de l ’ art je suis parmi les premiers et je pense être un des artistes vivants qui rapportent le plus à l ’ État français . » La chose est dite , et le message est passé .
L ’ époque est incertaine , mais on le sent toujours aussi actif . « Sur mes dernières séries , il n ’ y a pas de sujet , nous précise-t-il . Je laisse la couleur et l ’ énergie me guider ou je guide la couleur et l ’ énergie . Au final , je ne sais plus qui guide quoi ! » La liberté de son approche reste entière ; il révèle une vitalité toujours aussi débordante . « Oui , dans l ’ époque que nous vivons , très angoissante , je ressens le besoin de prendre la tangente , de ne pas en rajouter sur la noirceur ni sur la morbidité ; mais de donner de l ’ énergie de vie , de l ’ optimisme . Que le regardeur puisse en prendre plein la tête car moi j ’ ai toujours plein la tête d ’ images , de rêveries et de fantasmagories ! »