• Éditorial
Sauver Hexagone? Pas si vite.
Par Nicolas Godin
Le député de St-Jérôme, Pierre Karl Péladeau,
a récemment plaidé en faveur d’un sauvetage
du groupe de construction Hexagone, une
compagnie qui éprouverait des problèmes
financiers. Alors qu’il considère la firme comme
un ‘fleuron’ de l’économie québécoise, M.
Péladeau estime que sa vente à une entreprise
étrangère serait une perte importante pour
la province. Il croit ainsi qu’une intervention
gouvernementale serait appropriée afin de
maintenir ici le contrôle des actifs du groupe.
Bien qu’il soit évident que nul ne désire voir
le Québec perdre un siège social, on doit
cependant se demander si le jeu en vaut bien
la chandelle. En effet, les ennuis d’Hexagone
remontent à plus loin que ses récents déboires
de financement, alors que les actifs de la firme
ont été acquis du ‘célèbre’ Tony Accurso. On
sait effectivement que ce dernier fût forcé de
vendre ses compagnies en 2013 au moment
où les révélations de l’Unité permanente
anticorruption (UPAC) et le resserrement des
règles éthiques rendaient intenable sa position
comme propriétaire du groupe de construction.
Des problèmes d’accréditation
Or, depuis décembre 2013, une accréditation
de l’Autorité des marchés financiers (AMF)
est aussi nécessaire pour effectuer une
soumission sur les contrats publics de plus de
10 millions$. Hexagone n’a pas été en mesure
d’obtenir cette certification avant janvier 2014,
ce qui aurait coûté plus de 150 millions$ en
contrats à la firme. Alors que son concurrent
Dessau se réorganisait complètement avec de
nouvelles normes de gouvernance, Hexagone
peinait donc à tenter de faire reconnaitre ses
méthodes.
Joël Gauthier à la présidence
La sélection de l’ancien directeur général du
parti libéral du Québec, Joël Gauthier, comme
président d’Hexagone n’est pas non plus l’idée
du siècle. Cet ex-PDG de l’AMT a été forcé
de quitter son poste en juin dernier suivant les
actions de l’UPAC. Aujourd’hui impliqué dans
certaines histoires d’ingérence en matière
d’octroi de contrats, il est fort probable que le
passage de M. Gauthier ne donne pas confiance
aux clients potentiels de la compagnie.
En ce sens, peut-on blâmer les sociétés
publiques de tarder à traiter avec Hexagone?
Sans doute que non. Ainsi, avant d’investir
l’argent du public dans le sauvetage d’une
entreprise, il faudrait probablement se
demander si sa dissolution ne serait pas une
meilleure idée. Alors qu’il est clair qu’Hexagone
n’a pas pris au sérieux le besoin d’un
changement éthique en profondeur, on serait
bien tenté de laisser le groupe disparaitre afin
de tourner la page sur des événements bien
tristes de l’histoire récente du Québec.
Horizon Weekend - Montréal, 03 Août 2014 -- Page 3
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