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Vous avez commencé à apprendre le piano à quel âge? À 3 ans. À 7 ans, j’ étais sur scène.
Vous souvenez-vous de vos premières notes? Absolument! Puis j’ ai trouvé des partitions témoignages aussi, de « Valses » de Chopin, par exemple, où je ne savais pas écrire et où j’ avais écrit: « 6 ed Mi ». Et « Pour maman », bien sûr. Pour qui voulez-vous que ce soit?
Et qu’ appréciez-vous le moins? D’ être seule quand je voyage. C’ est très désagréable, parce que vous arrivez avec votre valise, vous rentrez dans l’ hôtel, il n’ y a personne. Le lendemain, ou bien vous jouez seule— et là vous ne connaissez personne, vous avez un inconnu là à qui vous devez raconter toute votre vie en 20 minutes ou 1 heure, et après vous prenez votre valise et vous repartez. Généralement, vous rencontrez l’ organisateur … Quelques fois, il y a un dîner, quelques fois non et vous retournez dans votre chambre, et c’ est vraiment ce que j’ apprécie le moins. Ou alors, vous tombez sur un orchestre qui n’ a pas du tout envie de jouer avec vous, un chef qui n’ en a rien à faire, qui a envie de jouer le morceau où lui va briller. Il n’ a pas du tout envie de vous accompagner. Quelques fois, ça se passe magnifiquement bien.
Vous avez co-fondé l’ Octobre Musical avec Mustapha Okby. Entre la première et la 23e édition, l’ Octobre Musical a-t-il évolué comme vous l’ auriez souhaité? Je n’ ai raté aucun Octobre Musical. Je pense que je suis venu à tous, sauf un ou deux où je n’ ai pas pu venir parce que j’ avais d’ autres engagements ailleurs. Au départ, le public était très « européen ». Et au fur et à mesure, j’ ai vraiment eu la jeunesse tunisienne qui est venue aux concerts, et ça, c’ était mon but. En fait, c’ est donner aux gens d’ ici l’ envie de connaître cette musique, parce que vous pouvez me répondre que ce n’ est pas notre musique mais je vais vous dire que le Japon et la Turquie, ce n’ est pas leur musique. Les Chinois non plus. J’ ai trouvé qu’ il y a eu un très très grand essor de ce festival il y a encore deux ou trois ans. Aujourd’ hui, vous connaissez les événements. On est un peu ennuyés parce qu’ il y a des gens qui sont frileux, des gens très importants qui ne participent pas comme avant. Je pense qu’ on a le devoir de se heurter contre ça et de continuer de faire ce que l’ on fait parce que c’ est l’ avenir de demain. Il faut garder ça.
Quels artistes aimeriez-vous voir se produire au cours des prochaines éditions? C’ est difficile à dire parce que j’ aime tellement de gens. On a fait venir des gens vraiment magnifiques … Après, il y a aussi une ouverture d’ esprit des gens qui viennent. Il faut que sur le plan humain, ces gens sachent très bien qu’ ils viennent ici et qu’ il y a un travail à faire. Il n’ y a pas seulement à jouer. Jouer, ça ne suffit pas. On n’ est pas une vitrine. C’ est une collaboration étroite entre le public et nous. Je suis très contente que l’ Octobre Musical existe et ce que je voudrais, c’ est que l’ on fasse tout pour qu’ il grandisse encore.
De nombreux Tunisiens se passionnent pour le piano. Qu’ auriez-vous à conseiller à ceux qui débutent? Je trouve qu’ il y a déjà un très grand progrès qui est fait. On a de très jeunes musiciens. Là encore, j’ ai entendu parler d’ un quatuor de guitares tunisien qui a participé cette année et que je ne connaissais pas. Et cette année, comme vous avez pu le voir dans le programme, il y a eu beaucoup de Tunisiens qui ont participé à cet Octobre. Et je trouve qu’ il y a de plus en plus de gens qui vont à l’ étranger, qui reviennent, qui prennent des conseils, qui reviennent … Ce que je leur demande, c’ est: « S’ il vous plaît, n’ allez pas pour ne pas revenir. Allez, prenez tout ce que vous avez à apprendre et rapportez la bonne parole ici. Ne restez pas là-bas. C’ est ici que ça se passe. C’ est vraiment le souhait qu’ il faut faire pour que ce soit transmis aussi avec les générations.
Quels sont vos projets après cette 23e édition de l’ Octobre Musical? Je vais déjà faire une master class ici, du 1er au 5 novembre. Quatre jours où je vais devoir mettre un matelas au conservatoire parce qu’ on avait prévu pas plus de 8 personnes-je ne sais pas combien on est maintenant, environ 16 pianistes. Et après, je pense que ce que vous allez entendre dimanche, la deuxième partie, mon projet futur c’ est d’ enregistrer ce disque qui est très spécial tourné vers l’ âme slave. J’ y tiens beaucoup, c’ est vraiment un projet qui me tient à cœur. Après, j’ aurai peut-être un projet plus loin mais je ne vais pas en parler maintenant.
Propos recueillis par Aziz Béjaoui.
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