De même que dans les moments de pause où le( la) citadin( e) s’ arrête de s’ agiter dans la verticalité et la trépidation de la ville, son imagination ouvre un champ mental qui permet toutes les projections, « un espace du dedans », de même la campagne semble présenter un large écran, un champ presque cinématographique, ouvert à toutes les rêveries. La platitude de la campagne, loin de la desservir, devient le support, l’ espace du dehors, offert au monde intime de celui( celle) qui la regarde. Est-ce sa monotonie- sa sérénité diraient certains, somme toute très relative si l’ on y songe un peu- qui laisse libre cours à nos divagations, nos souvenirs, nos désirs?
Il faut me croire quand je dis que je ne peux regarder un paysage champêtre sans y superposer un tableau, une scène, une image … Dans Dreams, le grand Kurosawa lui-même, non content de reprendre les peintures de Van Gogh, les rend vivantes et les anime au point que ses personnages entrent dans le paysage et l’ arpentent; à croire que regarder simplement la campagne, sans la filmer, en faire un tableau, bref la recréer, est insoutenable. Et assurément, les peintures de Klee me semblent moins artificielles, plus vivantes, que les parcelles de champs que je vois par les vitres de ma voiture …
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