Edition spéciale février 2018 Édition spéciale du canton de Vaud | Page 15

Depuis le 1 er janvier 2016 , Guy Parmelin dirige le Département de la défense , de la protection et de la population . Son élection au Conseil fédéral a permis au canton de Vaud d ’ y être à nouveau représenté après près de deux décennies d ’ absence . Pour le journal de l ’ UDC EDITION SPECIALE , Guy Parmelin se livre de manière authentique et personnelle . Un entretien avec Kevin Grangier .
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« Oui , comme tout le monde , j ’ attends mon tour à la boulangerie »

Depuis le 1 er janvier 2016 , Guy Parmelin dirige le Département de la défense , de la protection et de la population . Son élection au Conseil fédéral a permis au canton de Vaud d ’ y être à nouveau représenté après près de deux décennies d ’ absence . Pour le journal de l ’ UDC EDITION SPECIALE , Guy Parmelin se livre de manière authentique et personnelle . Un entretien avec Kevin Grangier .

Les conseillers fédéraux vaudois Constant Fornerod , Victor Ruffy , Paul Ceresole , Eugène Ruffy , Camille Decoppet , Paul Chaudet , Georges- André Chevallaz , Jean-Pascal Delamuraz ont tous été les chefs du Département militaire fédéral , soit l ’ ancêtre du DDPS , le département que vous dirigez . Sans parler du général Guisan , il semble bien que les Vaudois soient prédestinés à diriger l ’ armée . Peut-on dire qu ’ il existe un lien particulier entre l ’ armée suisse et les Vaudois ?
C ’ est vrai qu ’ à Berne on a parfois tendance à oublier l ’ histoire vaudoise – et donc romande – du département de la Défense . La personnalité du chef de département compte pour beaucoup dans la façon de conduire un dicastère . Je me plais à penser que j ’ apporte une manière très personnelle de diriger le DDPS d ’ aujourd ’ hui .
Remontons le temps jusque dans les années 1990 , vous obtenez votre premier mandat politique en 1993 en entrant au Conseil général de Bursins . Qu ’ est-ce qui vous a décidé à entrer en politique ?
L ’ envie de m ’ engager , de défendre mes idées et de faire passer des messages qui me semblaient important . Nous avons besoin de personnalités proches du terrain , qui connaissent les réalités locales et qui s ’ engagent en faveur des intérêts de la communauté . C ’ est d ’ ailleurs ce que permet à merveille notre système de milice : un parlementaire présent à Berne reste ancré dans sa région et « monte » à la capitale pour défendre les positions de son parti et de sa région . Aujourd ’ hui , en tant que conseiller fédéral , c ’ est un peu différent puisque je défends la Suisse dans son ensemble .
Vous avez dû faire le choix de vous porter candidat sur une liste électorale et vous avez choisi l ’ UDC . Pourquoi l ’ UDC et pas un autre parti ?
C ’ est une histoire de famille puisque mon père était lui-même membre de
Guy Parmelin a ses bureaux dans l ’ aile est du Palais fédéral , celui dédié au DDPS .
l ’ UDC . Et je m ’ y suis également retrouvé : pour moi l ’ UDC est le parti qui représente le mieux mes valeurs , qui comprend et défend les intérêts des gens et de notre pays . En tant qu ’ agriculteur-viticulteur à Bursins , je me suis retrouvé dans les positions de ce parti politique , les mêmes que j ’ ai ensuite représentées au Parlement vaudois , puis au Conseil national à Berne , avant d ’ être élu au Conseil fédéral en tant que membre d ’ un gouvernement collégial .
En 1994 , pour une seule voix d ’ écart , vous entrez au Grand Conseil pour représenter le cercle électoral de Rolle . Les années 1990 ont été des années marquées par la crise . En tant que jeune député , comment avez-vous vécu cette décennie difficile ?
Plus la situation est difficile , plus notre engagement de politicien est important . Notre responsabilité à l ’ époque était de sortir le canton de la crise , de parvenir à des compromis , de trouver des solutions concrètes et pragmatiques . Il s ’ agissait de retrouver une marge de manœuvre financière pour pouvoir investir dans le futur . La période était tendue , mais elle a donné tout son sens à mon engagement politique . Je peux même dire aujourd ’ hui que les difficultés de l ’ époque ont aiguisé mon sens politique et m ’ ont permis d ’ arriver là où je suis aujourd ’ hui .
En 2003 , l ’ UDC romande fait un carton aux élections fédérales . Vous êtes élu le même jour que Jean-François Rime , Yvan Perrin ou encore Oskar Freysinger . Comment expliquez-vous que l ’ UDC ait soudainement connu un tel succès en Suisse romande ?
Nous avons effectivement « surfé » sur la vague UDC de 2003 . C ’ est aussi la preuve que les bonnes idées sont communicatives ! L ’ UDC a montré cette année-là aux citoyens romands qu ’ elle comprenait aussi les « Welsches » comme le disent nos voisins suissesalémaniques . Et qu ’ elle s ’ engageait pour défendre les intérêts des citoyens
de Zurich à Genève , sans distinction .
Chaque conseiller fédéral amène en quelque sorte la sensibilité de son canton au sein du gouvernement . Comment est-ce que vous pensez représenter la sensibilité vaudoise au sein du Conseil fédéral ?
Je pense qu ’ il y a plus un style « Parmelin » qu ’ un style purement romand ou vaudois . Je défends mes dossiers à l ’ image de mon caractère : de manière posée et pragmatique . Pour cela , je me suis entouré d ’ une équipe de collaborateurs engagés , en qui j ’ ai une totale confiance . Tout le monde doit tirer à la même corde et viser rien moins que l ’ intérêt du pays .
Dans de nombreux pays , les ministres font l ’ objet de mesures de sécurité qui les éloignent des gens mais ce n ’ est pas le cas en Suisse . Cela veut-il dire que l ’ on peut boire son café dans un restaurant assis à côté de vous ou alors faire la file aux caisses d ’ un supermarché juste devant vous ?
Oui , comme tout le monde , j ’ attends mon tour à la boulangerie . En fait , lorsque je le peux , je me rends à pied au travail – ce qui me permet de faire une balade de 15 minutes à l ’ air frais avant d ’ enchaîner les séances et les déplacements de la journée . Je mange aussi parfois au restaurant à midi avec des membres de mon équipe . C ’ est une qualité typiquement suisse que d ’ avoir la liberté de faire des choses « normales » en toute simplicité . Cette valeur doit à tout prix être préservée . Cela me permet aussi de rencontrer des gens , de partager quelques remarques et idées avec eux , de prendre le pouls de la population , c ’ est important !
Avant d ’ accéder au Conseil fédéral , vous exploitiez un domaine vinicole . Est-ce que ça vous arrive encore de faire un tour dans vos vignes ou même de vendanger ?
Je n ’ ai malheureusement plus le temps de participer aux vendanges . Mais j ’ aime bien me balader et voir l ’ avancée des récoltes , les weekends , lorsque je rentre chez moi à Bursins . Ce domaine est une histoire de famille . Et même si j ’ ai définitivement tourné la page , il m ’ arrive parfois de donner quelques conseils à mon frère qui a repris l ’ exploitation après mon élection .
En 2002 , en tant que président de l ’ UDC Vaud , vous avez contribué à la fondation de la section des Jeunes UDC Vaud et , en 2015 , la liste électorale des Jeunes UDC Vaud a obtenu plus de 71 ’ 000 suffrages dans tout le canton , soit un meilleur résultat électoral que les résultats cumulés par toutes les autres jeunesses de parti . Aviez-vous ressenti en 2002 qu ’ il y
Guy Parmelin , conseiller fédéral , chef du DDPS , a été conseiller national UDC de 2003 à 2015 et président de l ’ UDC Vaud entre 2000 et 2004 .
avait l ’ envie et le besoin , dans la jeune génération , de pouvoir s ’ engager au sein d ’ une section Jeunes UDC ?
A l ’ époque , honnêtement , j ’ ai hésité à soutenir la création de cette section « jeunes ». Pour moi , des valeurs identiques nous réunissaient et il était dommage de nous distinguer entre des listes « jeunes », « seniors », « femmes » ou « hommes ». Finalement , j ’ ai constaté un tel engouement des jeunes à vouloir créer leur propre section que je me suis laissé convaincre . Et je ne le regrette pas vu la dynamique actuelle des jeunes UDC .
Si un jour un jeune vient vous trouver et vous demander conseil pour s ’ investir en politique , que lui diriezvous ?
Qu ’ il est important de s ’ engager . Car personne d ’ autre ne défendra mieux nos idées et nos intérêts que nous-mêmes . Que nous avons aujourd ’ hui besoin d ’ une nouvelle génération capable de défendre nos intérêts – et donc les siens ! – dans le futur .
Dans le canton de Vaud , comme ailleurs , beaucoup de jeunes s ’ interrogent sur le sens de devoir accomplir un service militaire . En tant que chef du DDPS , qu ’ avez-vous envie de répondre à un jeune qui vous interpelle sur le sens du service militaire ?
L ’ obligation de servir fait partie de notre Constitution . C ’ est une question de solidarité . C ’ est aussi , en quelque sorte , notre ADN suisse . Surtout : au vu de la situation internationale actuelle et des nouvelles menaces ( terrorisme / cyberattaques ) nous avons plus que jamais besoin de citoyens engagés et motivés . Le service militaire d ’ aujourd ’ hui est aussi plus attractif : il propose des équivalences entre l ’ école de recrue , les cours de répétition et les études académiques . L ’ armée offre de nombreuses possibilités de formations intéressantes . Il est important de se renseigner avant de juger .
Finissons notre entretien avec un peu d ’ imagination . Le monde de 2050 , il ressemble à quoi selon vous ?
Les évolutions technologiques sont si foudroyantes qu ’ il est difficile de répondre à cette question . Sans vouloir jouer l ’ oiseau de mauvais augure , le monde de 2050 sera très probablement moins sûr . Il penchera aussi nettement vers l ’ Asie d ’ où vient déjà le plus grand dynamisme .
Et la Suisse ?
Si elle sait anticiper les évolutions qui se dessinent , je suis persuadé que la Suisse peut envisager l ’ avenir avec une certaine sérénité . Quand je parle d ’ évolutions , je pense en particulier aux défis que posent le vieillissement de la population , le financement des assurances sociales , mais aussi les nouvelles technologies et les risques en matière de sécurité .
Et le canton de Vaud ?
Le canton de Vaud a su trouver les clés pour sortir de la crise des années 1990- 2000 . Il dispose de toutes les cartes pour affronter ces mêmes défis . A lui de bien les jouer et d ’ éviter de tomber dans le piège de la facilité . Rien n ’ est définitivement acquis .