Cercle des Familles 2019 #12 Addictions | Page 7

Interview Monsieur Jayle Didier Médecin en charge de la Chaire d’Addictologie au Conservatoire National des Arts et Métiers (CNAM) jusqu’en 2018, Didier JAYLE est également directeur de la publication de la revue Swaps et du site vih.org. Il s’est investi dans les soins aux malades du sida depuis le début de l’épidémie et continue d’exercer à l’Hôpital Européen Georges Pompidou. En 1986, il lance la première campagne d’information sur le sida en direction des lycéens et en 1988, fonde le CRIPS, centre régional d’information et de prévention du sida et des toxicomanies, à la demande du conseil régional d’Ile-de-France. Il dirige le CRIPS de 1988 à 2002. En 1995, il participe à la création de Nova Dona, un des deux premiers centres méthadone, à l’Assistance Publique de Paris. En octobre 2002, il est nommé président de la mission interministérielle de lutte contre la drogue et la toxicomanie (MILDT) qu’il quitte fin 2007. • Qu’entendons-nous par addiction et dépendance ? « Ce que l’on entend par addiction ou dépendance, c’est quand l’organisme a besoin d’une substance ou a besoin d’avoir un certain comportement pour se sentir bien. Si cette substance vient à manquer, le consommateur souffre d’un manque qui se traduit par un mal être : pour pallier, il va en reconsommer. On parle de consommation compulsive. En général on parle d’addiction aux drogues. Les drogues sont des substances qui modifient la manière de percevoir les choses, de ressentir les émotions, de penser et de se comporter. Elles vont directement intervenir dans le cerveau, sur le système de la récompense. Ce système agit comme un « baromètre interne » de l’organisme et va déclencher les actions nécessaires à notre survie telles que boire, manger ou se reproduire. La réalisation de ces actions apporte des sensations de plaisir. A l’intérieur du cerveau, nous avons des dizaines de neuromédiateurs, comme la dopamine, qui est l’hormone du plaisir, le séro- tonine, le noradrénaline ou les endorphines, qui régulent naturellement ce circuit de la récompense. La consommation de drogue active le circuit de la récompense et va engendrer du plaisir en agissant comme un leurre sur l’activité de ce système. En effet, toutes les drogues vont entraîner une sécrétion de dopamine au niveau d’un noyau cérébral, le « noyau accumbens », véritable centre du plaisir. . Quand la substance vient à manquer, l’organisme est en manque, le circuit de la récompense est aux abois et la seule façon de le calmer est de consommer à nouveau. Le baromètre interne est apaisé et tout fonctionne à nouveau correctement, en apparence. C’est la base de la dépendance. 7