Atypeek Mag N°1 | Page 78

ALBUMS Date de sortie : 30/09/2015 Durée : 1h 11 min Nationalité : FR Styles : INDUS / electronic / expérimental Date de sortie : 04/11/2016 Durée : 00:58:30 Nationalité : FR Styles : JAZZ / RIO / expérimental / math rock Date de sortie : 03/11/2016 Nationalité : PL Styles : Coldwave / Synth Krackhouse Comes Alive (Sordide Sentimental /Atypeek Music) Chromb ! 1000 (Dur et Doux / Atypeek Music) 7JK Ride the Solar Tide (Redroom) Retour sur un groupe newyorkais un peu oublié aujourd’hui. Krackhouse fut un projet lancé dans les années 80 par Mike Sappol, rejoint ensuite par Murray Reams et Doug Henderson, ce dernier étant devenu entre-temps bien réputé dans le milieu de l’art contemporain. C’est lui d’ailleurs qui assure le remaster de cette version digitale proposée par Atypeek d’un disque initialement paru chez Sordide Sentimental en 1993. Les paroles de Mike Sappol s’y trouvent aussi, révélant un second degré et un sens de l’absurde tout beckettien pour ces amateurs de dadaïsme sonore. Leur univers peut d’ailleurs s’apparenter à celui des Residents, de Renaldo & the Loaf ou de DDAA, à la fois free, industriel et ludique, relevant presque d’une forme d’art brut mêlé de poésies et spoken words. Sur ces sept pistes sonores, ils avaient aussi bénéficié de l’apport d’instrumentistes extérieurs, dont le plus connu est sûrement Eugene Chadbourne. Dès “Flowers of Shit” se mêlent des collages de bandes magnétiques, un groove de percussions inversées, une guitare funk maladive et un violon neurasthénique. Les Fleurs du mal de Baudelaire y sont retraitées en mode urbain, humoristique et trashy. “These Kids” va plus loin encore dans cette musique déstructurée, spasmodique, aux textes scandés. Inclassable et fou, à la limite du psychiatrique, le morceau se base sur des samples grouillants et rythmiques qui lui apportent une dimension dansante, bien que totalement déglinguée. Ça tâche, c’est cradingue tout en restant toujours dynamique. Sur “Mediter- ranean Homesick”, la guitare évoque Snakefinger, alors que “Rusty Razor Blade” pourrait être la BO d’un comics chez les cajuns du bayou et que “Pornovista” se rapproche d’une ethnicité aberrante comme celle des Texans d’Ak’chamel. “Virginia”, avec sa nature obsessionnelle, révèle un climat plus inquiet dans sa bizarrerie. Vingt minutes de délires bien régénérateurs. Il y a deux ans sortait le deuxième album de Chromb ! judicieusement nommé II, extraterrestre subjuguant. En misant sur le bon cheval, la prédic- tion voulait que ce quartet remette le couvert de haricots verts et c’est avec joie et bonheur qu’avec un peu de beurre, nous nous laissons entraîner par 1000 judicieusement nommé… euh non en fait… mais oui quand même ! Mille fois mieux ? En exagérant légèrement, cet album qui aurait dû s’appeler III en vaut bien le double, voire le triple puissance 4. Grâce à une col- lecte participative, 1000 est à peu de chose près la somme récoltée. Ce groupe français qui aime tant jouer avec les chiffres accentue ici son côté math- rock, réduit minutieusement son attache jazz et multiplie ses idées dans des structures élargies où l’insolence n’a d’égale que la maturité de l’écriture. La durée du disque a doublé, l’énergie est à son summum ; cependant, l’incursion dans 1000 ne se fait pas facilement. Rappelons que les Lyonnais n’ont pas de guitare ce qui fait reposer beaucoup de paramètres principalement mélodiques sur le saxophone, les claviers mais aussi la basse. Le groupe décline les influences stylistiques tout en gardant unité et énergie, se permet de rajouter par moments du chant humoristique. Parfois absurde et farfelue, la musique de Chromb ! est variée et consistante, même dans les expérimentations les plus poussées, l’aura de Mr Bungle planant furtive- ment de-ci de-là. Chromb ! a encore une fois mis dans le mille, c’est le cas de le dire avec un album léché dans les moindres détails, même si quelques micro longueurs effacent le côté immédiat des débuts. Fruit d’un travail considérable, semble-t-il, produc- tion incluse, 1000 suscite l’engouement et force le respect. Le groupe a su faire évoluer sa musique sans la dénaturer, c’est une réussite. Recentré autour de Matt Howden (Sieben) et Maciek Frett (Job Karma), le nouvel album de 7JK se présente d’emblée comme un trip. Le titre, l’artwork, les voix samplées, les thèmes et les ambiances hallucinées ne trompent pas, et dès l’introductif “Liftoff for 7JK”, le décollage est garanti. Plus psychédélique et cosmique que le précédent Anthems Flesh (2012), la musique n’en oublie pas les touches electro-wave (Chris & Cosey, Clock DVA, Depeche Mode, John Foxx, Nagamatzu...) mais les amènent vers des territoires totalement originaux. Véritable odyssée, parsemée de messages ésotériques, le disque tire sa force de l’alliance parfaitement équilibrée entre acoustique et électronique, violons et rythmes digitaux, voix réelles et voix échantillonnées. Mé- lodique et atmosphérique, cette aventure spatiale regorge de très belles compositions : “The Centre of the Universe” et sa basse cold accrocheuse, le mélancolique “Barry the Astonishing” et son violon fou comme tiré d’un vieux Tuxedomoon, la synthpop sous acide de “Black Hole Entropy” et surtout “Guidance is Internal”, symbiose totale entre l’univers des deux groupes pour toucher à une ethno-pop baroque pour l’ère atomique. Du début jusqu’à la fin, on ne touche plus terre, et on peut même se laisser aller à danser comme perdu au fin fond d’un nightclub sur une planète inconnue (“Undergrowth”). Ça plane sévère, la voix de Matt est toujours aussi pure et ses couches de cordes émergent avec grâce des beats addictifs de Maciek. De la bonne défonce. ✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uQ ✎ Aleksandr Lézy http://urlz.fr/53qt http://urlz.fr/53uT I 78 ATYPEEK MAG #02 JANV./FEV./MARS 2017 I I I ✎ Maxime Lachaud http://urlz.fr/53uW