Atypeek Mag N°1 Atypeek Mag N°1 - Octobre - Novembre - Décembre | Page 27

ATYPEEK MAG # 01 OCT./ NOV./ DEC. 2016 27
© DR une love story euphorique et tragique
Classe mais cocasse, l’ histoire de la batterie d’ Alessandro Giannelli qui éveille la flamme du violon de Tobias Preisig. Instrument à cordes sorti tout droit de sa scène classique pour faire une cour haute en couleur aux tomes généreux de sa bien-aimée percussive. Une cour aux variations vibrantes embrassant les contours et formes d’ une love story euphorique et tragique. De pics en pleurs, d’ éloges passionnés en lamentations troublantes, les atomes crochus et accrocheurs du duo échangent leurs électrons d’ électro ambiancée, projetant leur champ magnétique tel un lasso d’ émotions majestueuses et sauvages: le morceau « Patrol » se caractérise notamment par cette respiration saccadée, presque à mi-souffle, cet élan impétueux qui enserre, enflamme et élève. Tobias Preisig, comme dans son expérience précédente de quartet, est en phase avec l’ héritage classique de son instrument. Mais grâce à l’ amplification, toute sa puissance dramatique et la sensibilité exacerbée de sa texture si touchante se retrouvent démultiplier. À l’ inverse, elles peuvent également s’ immiscer en échos discrets, ténus, timides comme sur « Purple air » et « William », à la limite du Chill-out de Savages et de Sound Defects. Minimalisme capricieux, elles se réduisent parfois à un arpège de musiques du monde
Plus d’ informations sur Egopusher: www. egopusher. com
lancé par Preisig s’ il décide que son violon est aussi une guitare, une mandoline ou un ukulélé.
Deux personnes, quatre sources de sons différentes. Pas d’ erreur ni de piège: au moment où les moulinets de baguettes entament une tyrolienne désarmante, Preisig, à coups d’ archers solennels, vient juste de dépeigner la chevelure métallique de son gentleman à trois cordes. Il lancera, à la Daft Punk, une boucle de quelques notes mélodiques de synthé programmées en récurrence avant de reprendre sa coupe là où il l’ avait laissé. Entre deux frappes de colosse, Giannelli fera glisser une baguette sur son pad et libérera l’ autre de sa frénésie rythmique afin qu’ elle puisse déclencher le mystérieux bouton d’ une console codée pour une ambiance profonde et introspective. Egopusher, qui avec deux sonne quatre, fait de « Ego »(« moi » en latin) un « moi » collectif à explorer, sonder. D’ abord par circonvolution légère, puis par cible lorsque la trajectoire de l’ ellipse se précise jusqu’ à atteindre son point d’ intensité le plus élevé. Sur « Dirt », « Ego Eins » et « Duster », la longue nuée transparente soufflée par le violon orientalisant s’ illumine au pétillement des cymbales. Très vite, le papillon diaphane se densifie dans le giron de leur rayonnement, comme une seconde chrysalide troquant progressivement les ailes translucides pour des surfaces d’ argent chromé. Se conserve la finesse mais s’ invitent vitesse, puissance et hargne. Les trémolos tonitruants du violon rappellent alors les tressaillements indomptables de la guitare de Marc Ribot, ouvrant à l’ auditeur une tranchée directe vers une veine d’ air ascensionnelle.
Duo original ou quartet fantôme qui invente les deux autres membres de son équipe, Egopusher est un spectacle d’ antithèses harmonieuses: Giannelli, le géant massif, stylé rock, Preisig le fin dandy stylé salon. Récemment en concert durant l’ édition 2016 de Jazz à Vienne, l’ un et l’ autre ne manquaient ni d’ allure ni de panache, s’ escrimant à délivrer leur électro-trip hop jazzy aux pieds d’ un cadre seyant si bien à leur prestance: la grandeur du théâtre antique. En espérant un jour que leur présence raisonnante aura l’ occasion de s’ épanouir à l’ intérieur de l’ enceinte, il faudra se représenter ce show à partir de leur mini-album éponyme sorti fin 2015 et de leur magnifique clip « Purple Pit ».
“ De pics en pleurs, d’ éloges passionnés en lamentations troublantes, les atomes crochus et accrocheurs du duo échangent leurs électrons d’ électro ambiancée”
ARTICLE de Jonathan Allirand
À SAVOIR
Egopusher en live
13 / 10 / 2016 au MaMa Festival,( Paris) FR 27 / 10 / 16 ISC / W Leech,( Bern) CH 11 / 11 / 16- Stall 6 / w Dave Eleanor,( Zurich) CH 12 / 11 / 16
Ferme Asile,( Sion) CH