La recherche du vrai
Une recherche rapide sur Google , et le verdict tombe : l ’ île Maurice se résume , visiblement , à ses plages de sable fin . Mais Google ne connaît pas toute l ’ histoire , et il est temps de prendre les choses en main .
A new look at Mauritius • A quick Google search returns the verdict : Mauritius seems to be all about sandy beaches . But Google doesn ' t know the whole story , and it ' s time we Mauritians took matters into our own hands .
Everything local
Le local a la cote . À Maurice , on placarde le mot sur les affiches publicitaires , les devantures des magasins , les menus des restaurants , les posts Instagram des hôtels et les campagnes marketing des banques . Cette mouvance , exacerbée par le repli forcé de l ’ ère Covid , n ’ est pas propre à Maurice . L ’ extraordinaire essor d ’ Airbnb et l ’ obsession des acteurs du tourisme pour des expériences « authentiques » qui « nourrissent le sense of place » révèlent une quête du local qui ne montre aucun signe d ’ épuisement .
Mais comment définir l ’ authenticité locale , la vraie ? Après tout , nos fleurs de frangipanier proviennent d ’ Amérique tropicale , les coquillages vendus sur nos plages sont importés des Philippines et nos paniers tressés de Madagascar . On pourrait presque croire que tout ce qui nous caractérise n ’ est , finalement , pas très mauricien . Sauf que le pays a de quoi s ’ affranchir de son image de paradis tropical pour révéler ses richesses insoupçonnées . Le mauricianisme n ’ est pas là où on le croit ( ni là où on le vante ). Alors où ?
Le Larousse définit l ’ authenticité comme « la sincérité des sentiments , la vérité d ' un témoignage ». Le vrai est donc ce qui caractérise l ’ authenticité d ’ une relation ou d ’ une expérience . Et pour trouver le vrai Maurice , on parle aux Mauriciens . On se promène dans les rues animées de Port-Louis , où marchands de dal puri et gro palto se côtoient . On écoute Anne-Ga et Explik ou Ka sur Radio Plus . Le vrai Maurice est cousu dans les vêtements imaginés par des créateurs mauriciens , et dans les mains habiles qui fabriquent les produits Made in Moris . Il est sur les murs de la galerie Imaaya , et sur les planches du Caudan Arts Centre . Il se vit ensemble pendant une soirée électro , un pique-nique à la plage , ou une procession de Cavadee . En d ’ autres mots , ouvrez les yeux : il est partout . Et pas que sur nos plages !
Ananda Devi écrit : « Français , créole , télégoo , toutes ces langues sont des ombres qui me narguent , des lumières qui m ’ éludent . Aucune ne m ’ appartient en propre . J ’ ouvre la bouche , et je sais que ma véritable langue , c ’ est le silence ». En ce sens , cette quête du local est peut-être une quête d ’ un soi collectif . Un voyage identitaire . Un questionnement plutôt qu ’ une réponse . N ’ est-ce pas là , ce qui nous distingue du reste du monde ? Loin du cliché de « Nation arc-enciel », Maurice est en fait une nation en devenir . Et de l ’ assumer , c ’ est d ’ honorer le vrai .
Alors finissons-en avec les stéréotypes qui tamisent notre diversité . Comme un serpent rejette son exuvie , débarrassons-nous du tandem séga / coco qui nous colle à la peau . Soyons fiers de nos plages et de nos traditions , mais accueillons aussi nos élans créatifs , nos jeunes rebelles , nos métissages et nos relations compliquées . Avançons .
Aparté
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