ACTES FIAPA | Page 65

anglais , et encore moins l ’ espagnol .
En l ’ absence de bulletin d ’ informations et de renseignements , les rumeurs les plus folles circulent donc les personnes ne font confiance à personne et refusent toute aide , même lorsqu ’ elles en ont un besoin criant .
Les téléphones ne fonctionnant plus , je dois me rendre sur place pour dialoguer , ce qui est extrêmement chronophage . Et ralentit considérablement les évacuations .
Les 5 assistantes sociales de l ’ hôpital ne peuvent être là . Hormis l ’ une d ’ entre elles , les autres ont été blessées ou ont des enfants blessés . Elles sont donc parties avec les premiers avions .
Les infirmières libérales , souvent en familles monoparentales , ne font plus de tournée de soin car il n ’ y a personne pour garder leurs enfants , et leurs habitations impactées sont trop dangereuses pour qu ’ elle puisse y laisser leur enfant en sécurité .
Sous la supervision d ’ un médecin , mon chauffeur et moi apprenons à faire les dextro , le suivi diabétique minimum , et les premiers pansements . Dès lors que la plaie change de couleur ou que les bords nous semblent chauds , nous avons ordre de conduire les personnes à l ’ hôpital .
Les ruptures de traitement dues aux maisons
éventrées
entrainent
des
hospitalisations
en
urgence .
Le 11 septembre , nous n ’ avons pu faire partir que 5 % de la population . Nous sommes de nouveau en alerte cyclone de catégorie 5 prévu pour le lendemain .
Le 12 septembre , nous sommes épargnés par l ’ ouragan José . Nous avons eu quelques pluies mais dans l ’ ensemble nous allons bien . Ou alors nous sommes blasés ?!...
L ’ aide commence à arriver : l ’ eau , les hommes , les vivres , les bâches , le matériel , etc … Nous pouvons maintenant passer la frontière , fermée depuis le cyclone Irma , pour évacuer nos malades sur civière par hélicoptère . La réserve sanitaire arrive avec une floppée de professionnels en forme . Un navire hôpital nous rejoint et les opérations peuvent se faire plus facilement .
Cette embellie ne durera que jusqu ’ au prochain cyclone de catégorie 5 , Maria , le 16 septembre . La Guadeloupe est touchée et sa basse terre est impactée fortement . Cela va avoir une incidence sur la suite puisque l ’ aide n ’ arrive quasi plus . Elle est stoppée et utilisée en Guadeloupe en priorité . Pour Saint Martin , c ’ est une deuxième catastrophe . Les tentes arrivées et stockées sur le port sont perdues . Les habitations flageolantes après Irma et José s ’ effondrent , ce qui représente environ 15 % du bâti .
Personnellement , mon habitation est dévastée . J ’ ai perdu mon toit et les fenêtres . Et comme tout le monde , je n ’ ai pas pu consolider avant l ’ arrivée de l ’ ouragan Maria . Résultat : tout mon premier étage est dévasté .
Je n ’ ai même plus de carrelage au sol et le rezde-chaussée se retrouve avec 90cm d ’ eau de mer . Rien ne pourra être récupéré . Je suis donc sans logement . Je serai hébergée chez mes amis jusqu ’ en janvier de l ’ année suivante , le temps de trouver un logement habitable mais avec un loyer double , une des résultantes de la pénurie de logement . Je m ’ estime chanceuse car la plupart de mes collègues de travail n ’ ont , à ce jour , pas de solutions de logement pérenne .
Un état des lieux avant et après les catastrophes naturelles s ’ impose :
AVANT : Au niveau social , la compétence exercée par la Collectivité d ’ Outre-Mer de Saint- Martin n ’ est pas plénière et c ’ est un choix politique . Ils ont choisi de ne pas avoir de CLIC ( Centre Local d ’ Information et de Coordination ), ni de CCAS ( Centre Communale d ’ Action Sociale ). Il n ’ existe pas de FSL ( Fonds Solidarité Logement ) qui permet d ’ apurer les dettes locatives en vue de prévenir les expulsions . La crise du logement sociale est réelle puisque les demandes ont plus de 10 ans . Les services existants sur le territoire sont le SESSAD ( Service d ’ Éducation Spéciale et Soin à Domicile ), le SIAD ( Service Infirmier À Domicile ), l ’ HAD ( Hospitalisation À Domicile ). À Saint-Martin , c ’ est un dispositif privé qui ne dépend pas de l ’ hôpital . Nous avons aussi le centre de dyalise qui est un dispositif privé , 3 SAD ( Service À Domicile ) et une MAIA créée en juin 2017 juste avant les ouragans , ainsi que la CAF et la sécurité sociale .
APRéS : Les services de la CAF , dont le bâtiment a perdu sa toiture , ont été réaffectés en Guadeloupe en laissant un numéro d ’ appel . Mais la population n ’ est pas en mesure d ’ utiliser les services téléphoniques ainsi qu ’ internet qui ne fonctionnent pas . A ce jour , 40 % du territoire n ’ est pas couvert et les travaux de raccordement sont en cours . La sécurité sociale a fait de même , pour les mêmes raisons . Les évasans doivent être gérés par l ’ hôpital . À ce jour , il n ’ est pas rare qu ’ après une
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