Acte de colloque : La pierre, un choix sociétal | Page 120

Conclusion
Lors des rénovations thermiques avec du béton de chanvre , on tire bénéfice des qualités architecturales et climatiques de la pierre . C ’ est ce que nous voulons tous faire : tirer bénéfice des qualités architecturales et climatiques de la pierre , mais aussi du bois et de la terre .
Ensuite , nous avons eu droit à un show à la fois passionnant et très drôle sur la construction en pierre , avec les regards croisés d ’ un architecte , d ’ une ingénieure et d ’ un artisan . Christophe , qui est un ami depuis plus de 20 ans , nous a dit , avec sa manière très modeste : « La question de départ était “ Comment faire une maison qui apporte un maximum d ’ artisanat ?” et “ Comment faire pour que tous les artisans prennent un maximum de plaisir à la construire ?” ».
C ’ est aussi pour cela que j ’ aime tellement le mouvement de la Frugalité : elle ne s ’ appelle pas pour rien « heureuse et créative ». Nous avons beaucoup de plaisir à travailler ensemble . On le fait en général de manière joyeuse . On essaie aussi de faire en sorte que les gens qui travaillent avec nous , que ce soit à nos livres ou aux bâtiments que l ’ on réalise , aient du plaisir à le faire .
Et cette expression « d ’ architecture à énergie humaine ». Le parti pris pour ce bâtiment était de construire avec des pierres de 20 centimètres d ’ épaisseur , plus une isolation par l ’ intérieur , un plancher en bois parce qu ’ il n ’ y a rien de moins cher — il faudra que l ’ on en rediscute , Christophe — et une charpente bien isolée .
Deux autres citations de Christophe : « On a pu faire du BIM sur ce chantier , car les artisans de la pierre et du bois ont les outils pour cela ». On retrouve là ce que disait Vincent : certes , il y a encore le geste et une tradition , mais il y a aussi les techniques les plus modernes , à la fois pour la construction , mais aussi pour la conception .
Nous avons compris que c ’ était un projet sur lequel l ’ économie était un fort enjeu . « On a pu baisser le devis de la pierre de 115 000 à 95 000 euros , en simplifiant la construction ». Mais Sébastien m ’ a quand même dit que 10 % de budget en plus auraient été bienvenus !
Ensuite , nous avons eu la chance de profiter d ’ un réjouissant cours de résistance des matériaux pragmatique par Marine Bagnéris . Que nous dit Jean Rondelet , ingénieur du 19 e siècle ? Qu ’ il faut faire collaborer le mur en pierre et la charpente en bois . En appliquant sa règle , on arrivait à des murs de 52 centimètres d ’ épaisseur . Aujourd ’ hui , avec l ’ Eurocode 6 et le DTU 20.1 , on arrivait presque aux 20 centimètres dont Christophe rêvait . Elle nous a montré après comment ils avaient fait . Au final , c ’ est la méthode des « éléments discrets » qui a été appliquée . Je ne connaissais pas cette méthode , mais dès que j ’ en aurai le temps , je vais regarder . Cela a l ’ air assez passionnant .
Ensuite , quand Sébastien est arrivé sur scène , il a dit quelque chose qui m ’ a beaucoup amusée : « Je vais être moins technique , j ’ ai juste construit la maison ». Vous avez compris que l ’ on a eu trois personnalités à la fois fortes , pleines d ’ humour et pleines de modestie , qui se sont retrouvées autour de ce projet de maison . Je pense que le client a eu beaucoup de chance .
Dans la table ronde qu ’ ils ont faite ensemble , on a eu une passe d ’ armes très drôle aussi : contrairement à ce que dit Perraudin , le calepin n ’ est pas l ’ apanage des architectes . Il faut intégrer la compétence de l ’ appareilleur-tailleur de pierre , sinon on passe à côté de 2 000 ans d ’ histoire de l ’ architecture . Cela a tellement fait plaisir à nos amis tailleurs de pierre , je me suis dit qu ’ il fallait que je le redise et que je le mette en orange au tableau !
Sébastien nous a dit : « Je ne suis pas architecte , mais je connais la pierre , je sais la choisir , je sais la tailler et je sais la poser ». On n ’ en doute pas , vu le résultat . Bravo , Sébastien .
La dernière intervention de l ’ après-midi était intitulée : « Quelle stratégie d ’ attractivité pour demain ? ».
Laurent Marmonier , président de la CAPEB de l ’ Isère , nous a dit : « Certains jeunes se définissent de moins en moins par leur métier . Ils veulent se construire , avoir des expériences multiples . Ils restent souvent moins de 5 ans , voire 2 ou 3 ans dans une entreprise , ce qui bien sûr crée des problèmes pour cette entreprise . D ’ autres veulent travailler pour faire quelque chose d ’ utile , servir la collectivité , faire un métier avec un savoir-faire reconnu , un métier qui fait rêver ».
Il y a eu une discussion que j ’ ai trouvée très intéressante sur les conseillers d ’ orientation . Laurent nous a expliqué , dans la table ronde , qu ’ il travaillait avec certains lycées pour améliorer les choses .
Deux autres verbatim de Laurent : « La pierre est un matériau cru , local , avec peu d ’ impact environnemental . » ; « Être tailleur de pierre est un métier “ à part manuelle ” ». C ’ est quelque chose que je vais mettre dans un coin de ma tête . Bien sûr , il faut des compétences manuelles , mais cela demande aussi beaucoup de réflexion , puisque sur un chantier , il faut résoudre des problèmes complexes . Je pense que tous les tailleurs de pierre qui sont là en ont déjà fait l ’ expérience , de la même manière que les architectes l ’ ont faite aussi .
Marina nous a parlé de Manufacto : c ’ est un magnifique projet . Pendant 5 à 6 mois , 12 ateliers de 2 heures , pour montrer concrètement à des enfants la pratique de plusieurs métiers , avec l ’ encadrement de professionnels , en partant de la matière . Cela peut être différents types de matière , avec
120 COLLOQUE - LA PIERRE , UN CHOIX SOCIÉTAL